DE TRESBES A GOLGOTHA - DE GOLGOTHA A NOUS

LE MOT DU PASTEUR - AVRIL 2018

Avril 2018

L’attentat terroriste, à Trèbes, a une fois de plus figé le pays dans la consternation, mais cette fois-ci une lumière particulière jaillit. Jaillit cette lumière du Lieutenant-Colonel Arnaud Beltrame, qui s’est avancé pour offrir sa vie, et pour prendre la place de l’otage. Ce don de soi, pesé, mesuré marque aujourd’hui tous ceux qui dans le respect mesurent le poids d’une telle démarche. Ce don de soi, nous émeut car il dit profondément ce à quoi nous aimerions tous arriver, du moins, tous ceux qui ont une aspiration profonde à l’amour du prochain. Ce don de soi, marque l’otage libérée qui, aujourd’hui, vit grâce à celui qui a pris sa place.

Dans ce don de soi nous sommes en plein dans la réalité de la substitution, le Lieutenant-Colonel s’est avancé, volontaire, dans la densité des déterminations et des questionnements, vers ce lieu où il a pris la place de l’otage, la place de celle qui allait être exécutée.

Cette réalité de la substitution, est absolument nécessaire au sein de nos vies, dans ses gradations, ses déclinaisons, elle relève de la solidarité humaine, et d’une humanité au diapason de Dieu. Les plus nobles et les plus réalistes des devises des différents corps de l’Etat sont ici honorées.

Mais cette réalité, forte, émouvante, nous conduit au-delà de Trèbes : la résonnance pour les chrétiens va jusqu’à Golgotha ; là, il y a deux mille ans notre Sauveur, le Christ, le Fils de Dieu s’est substitué à nous pour nous libérer de la domination et de l’emprisonnement du Diable. Là, à Golgotha, le Fils de Dieu, a pris la place d’une humanité qui aspire à être libérée, à retrouver la vie, celle qui se sent prisonnière du mal, et qui aspire à une vraie liberté. La substitution pénale du Christ, si combattue en théologie depuis le 19ème siècle, reçoit à Trèbes une lumière vive, faite de lettres de noblesse ; elle sort de l’ombre pour mieux être comprise.

Mais cette lumière devient éclatante, lorsque celui qui était prisonnier comprend que c’est à sa place que Christ a payé sur la croix. J’imagine ici, cette dame, qui a été libérée, perplexe en voyant le Lieutenant-Colonel s’avancer, et fuyant la détresse de la menace de la mort, croiser le regard de celui qui est venu prendre sa place. Inouï alors, ce qu’elle vit, libérateur et déchirant. Il en est ainsi du croyant qui réalise par le moyen de la foi, ce que Christ a accompli pour lui. Trèbes, éclaire Golgotha, en bonne partie.
Mais cet éclairage ne peut se faire dans la personne, sans une foi personnelle, non pas celle du charbonnier, mais celle qui saisit les enjeux, expérimente les bienfaits. Par la foi, le Saint-Esprit "illumine" le cœur et l’intelligence du croyant.

Le drame de Trèbes, vécu à une semaine du Vendredi Saint, nous a fait entrer dans une célébration vive de la semaine de Pâques. Nous aimerions tous que ce Lieutenant-Colonel revienne à la vie, comme Christ est ressuscité le 3ème jour. A coup sûr, il restera vivant dans nos mémoires, dans notre reconnaissance et dans ce qui touche au plus profond de l’être. Au vu de ce que l’on entend, on peut penser qu’il était inspiré non seulement par ce qu’il était, mais aussi par ce qui faisait sa foi et qu’il vit en Dieu. Au retour de Christ, il ressuscitera. Il y a là un laps de temps qui suspend notre joie, notre attente.

Christ en allant à la croix, savait qu’il ressusciterait le 3ème jour, savait qua sa résurrection était nécessaire à notre foi, et qu’elle a été une étape dans la vivification du monde, et dans le don du Saint-Esprit.
Ma prière, peut-être est-ce aussi la vôtre, est que cet acte de substitution, sonne une heure nouvelle, marque dans le pays, une ère où tous ceux qui sont habités par la haine, comprennent que le véritable héroïsme n’est pas celui de tuer ou de haïr, mais celui d’aimer et d’offrir de sa vie.

Le don de la vie s’inscrit dans une liberté colossale, dans une justice particulière ; non pas ma propre justice, qui m’élève au-dessus des autres, mais une justice qui recherche le bien, le salut de l’autre. Puisse Dieu lui-même éclairer nos cœurs émus, consternés, perplexes ; que Dieu nous accorde par les événements terribles de Trèbes, d’entendre ce qu’Il nous dit depuis Golgotha : combien il nous aime, et combien nous avons besoin de sa miséricorde. Que la paix de Christ nous accompagne en ce temps de Pâques, ainsi que les familles
frappées par tant de violence.

Antoine Da Silva